De l'autre côté du miroir

« The Angel Maker's Daughter » de Carrie Ann Baade

NdK : Ce texte est l'épilogue de la série « Églantine », signé par mon ami Louis-Thomas.

Vous avez manqué le début ? Pas de souci : lisez les première, deuxième, troisième et quatrième parties.

Cet article a déjà 12 ans : il contient peut-être des informations devenues obsolètes.

Mon ami, je viens de terminer la lecture de ta lettre et je ne puis m’empêcher d’y répondre.

Je sais que tu as écrit ceci au jour mourant ; je sais que tu m’as lancée, là-bas, au vent. Je n’aurais jamais dû te lire, mais vois-tu, c’est là la beauté de la vie : certaines situations ne surviennent que lorsqu’elles sont inespérées.

Ainsi, je ne serais rien d’autre que ton œuvre, que le souffle que tu m’as donnée et qui déjà faisait crier la tempête de mon amour latent ? J’ai le souvenir d’une aube qui s’est couchée sous ta main, prétextant la recherche des ténèbres. J’aurais voulu te cacher ma nudité, ce matin là. Je t’ai senti terrible au fond de toi et j’ai voulu, un instant, t’appartenir toute entière.

La nuit était levée, et j’étais vivante et tu étais absent. J’ai voulu consacrer le silence de ton sommeil ; un coup d’oeil à la lune teintée du feuillage printanier et je me laissais tomber dans l’eau de mer glacée. L’espoir m’appelait-il ? Je ne le sais pas, mais je n’ai plus jamais senti ta caresse me retenir.

Suis-je ta création, doux amour ? Tu es mort, ce soir, sous l’œil vert – demain, la pluie ; je te possède à présent.

M’as-tu désirée ? Tu m’as donné au vent, et je l’habite et il m’habite.

Je te laisse mon corps, cette carcasse que tu as aimé. Je vis, enfin,

À jamais, aime-moi.

Églantine