Hagalaz' Runedance Frigga's Web

Dark folk

Coup de cœur de La Lune Mauve

Pochette de « Frigga's Web » de Hagalaz' Runedance

Note :
5/5
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D’abord, ce sont les chants des sirènes guerrières qui émanent de la brume. Des litanies nées de la mer, portées par ce qui semble être un cor lointain, annoncent la musique sans concession qui s’apprêtent à être jouée. Des incantations au goût salé, chantées par quelque banshee ou par quelque divinité.

Puis ce sont les tambours qui retentissent, émanant du Monde d’En-Dessous, et non de la Moria : ce ne sont pas des gobelins qui délivrent un message, mais Hel, reine de la mort. Martial, le disque l’est assurément, avec des rythmiques et des sonorités acoustiques (cornemuse, bodhrán, tambours, caisse claire) qui ne sont pas sans rappeler Rosa+Crvx.

Mais ici, c’est l’œuvre d’une femme, Andrea Haugen, tête pensante de Hagalaz’ Runedance et par ailleurs musicienne touche-à-tout, et c’est cette féminité puissante, connectée aux forces telluriques, qui confère au disque toute son originalité.

Là où la dark folk s’accompagne souvent d’une imagerie viriliste, voire militaire, aucun de ces colifichets ne trouble la sombre détermination de Haugen. Frigga’s Web – la toile de Frigg, déesse nordique, protectrice du mariage et de la maternité, magicienne clairvoyante – est non seulement le titre de l’album, mais aussi celui d’un morceau-clé du disque. La narratrice y évoque la rencontre avec une messagère, parabole de la Mère et de la Déesse, qui lui permettent de changer sa destinée.

Le morceau suivant, Labyrinth, est une autre histoire racontée sur un thème musical proche de l’oraison. Chantées en allemand, les paroles accentuent la portée narrative de l’album, et dépeignent labyrinthe, énigmes et forêts.

Toujours, la musique est magistrale, les voix dignes et incroyables, et les instrumentations léchées (mais pas trop : le mixage permet de conserver un son acoustique très chaleureux, en dépit des embruns qui le parcourent de part en part). Ce disque hautement initiatique puise ses racines dans le néo-paganisme, Haugen défendant un héritage culturel et symbolique issu du mouvement völkish.

Mélancolique, mais toujours ferme, la musique de Hagalaz Runedance est un tunnel menant à un monde païen omnipotent, où l’on chante les âmes défuntes des animaux, les silencieuses forêts ainsi que les divinités féminines de jadis, écrasées par les traditions religieuses patriarcales.

À bien des aspects, ce disque est un chef d’œuvre, qui résonnera longtemps sur La Lune Mauve.